1. « Le 22 janvier 1892, je me promenais sur un sentier avec deux amis. Le soleil se couchait et tout d'un coup, le ciel devint rouge sang. Je m'arrêtai, fatigué et m'appuyai sur une clôture. Il y avait du sang et des langues de feu au-dessus du fjord bleu-noir de la ville. Mes amis continuèrent et j'y restai, tremblant d'anxiété. Je sentais un cri infini qui passait à travers l'Univers et qui déchirait la nature. »
2. Cet étrange récit est celui d'une vision. Il est tiré du journal intime du plus connu des peintres norvégiens: Edvard Munch. L'angoisse qu'il ressentit ce jour là fut si forte qu'il se saisit de ses pinceaux afin d'exprimer son émotion sur une toile. Ainsi naquit l'un des plus célèbres tableaux du monde: Le Cri. Munch en peindra cinq exemplaires. Qui est ce peintre sachant si bien exprimer ses émotions ?
3. Edvard Munch naît en 1863 à Løten, une petite ville située au nord d'Oslo. Très tôt, son enfance fut marquée par le malheur car, à huit ans, sa mère mourut de la tuberculose, une grave maladie des poumons qu'on ne savait pas soigner à l'époque. Peu de temps après, c'est au tour de sa sœur aînée, Sophie, de mourir de la même maladie. Le jeune Edvard lui-même est de santé fragile. Sa seule consolation est le dessin. Sa tante Karen, la sœur de sa mère décédée, l'encourage en lui offrant de la peinture et des pinceaux.
4. Edvard est doué. Son père, un médecin militaire, comprend que son fils ne deviendra pas ingénieur comme il l'aurait souhaité. Il accepte de l'inscrire à 17 ans à l'école royale de dessin d'Oslo. Munch s'y fait immédiatement remarquer à la fois par son talent et par la nature tragique de ses tableaux. Il aime peindre sa famille, en particulier sa sœur morte. En 1886, à peine sorti de l'école, il présente une œuvre qui choque la critique: L'Enfant malade. C'est naturellement de sa sœur Sophie qu'il s'agit. On parle « d'infâme barbouillage, sans queue ni tête ».
5. Munch comprend qu'il doit travailler plus afin de trouver un style personnel. Il a entendu dire qu'à Paris, un nouveau groupe de peintres s'est formé avec des idées révolutionnaires. Ils peignent en extérieurs, par petites touches colorées pour capter les jeux de la lumière. On les appelle Les impressionnistes. Munch se rend donc à Paris. Il y restera trois ans. Les deux peintres qu'il admire le plus sont Gauguin et Van Gogh. Il aime la violence de leurs couleurs ainsi que leurs grands coups de pinceaux.
6. Munch revient à Oslo avec une belle production. Plus d'une centaine de tableaux. Hélas, un incendie détruit une partie de ses toiles. Décidément, il n'a pas de chance ! En 1892, pour se changer les idées, il repart en voyage. Destination Berlin où un autre groupe d'artistes commence à faire parler de lui. On les appelle Les expressionnistes. Comme les impressionnistes français, ils expriment leurs émotions à travers la peinture mais de manière beaucoup plus radicale.
7. Angoisse, mélancolie, désespoir … Tels sont les sentiments qui habitent Munch et depuis si longtemps. Le style expressionniste des peintres qu'il rencontre à Berlin lui donne une idée. Il va composer une série de tableaux pour exprimer toutes ces émotions. Cette série s'appellera « La Frise de la vie ».
8. Le public est bouleversé. Tout le monde en effet éprouve un jour ou l'autre dans sa vie de l'angoisse, de la mélancolie ou la peur de la mort. Avec les toiles de cette série, Munch qui meurt en 1944 réussit parfaitement comme avec Le Cri à nous faire partager ces émotions.